Troisième et dernier billet sur le sujet des NAO, négociations annuelles obligatoires dans les entreprises ! Dans le précédent, nous avons vu l’importance de fixer des objectifs à cette négociation plutôt que de commencer par avancer des « mesures » sur lesquelles, faute de projet commun, les partenaires sociaux ne feraient que surenchérir. Exemple d’objectif : retenir les talents au sein de l’entreprise. Une fois déterminés les objectifs, les mesures en découleront. Mais lesquelles ? Dans un billet publié ici le 30 novembre 2021 (Apocalypse NAO !), j’avais lancé un appel à la créativité du dialogue. Dans celui-ci, je vous propose très concrètement quelques pistes de réflexion, certainement reproductibles dans de nombreuses entreprises. Restons sur l’objectif d’attractivité, notamment celui de retenir ses salariés et de lutter contre d’éventuels symptômes annonciateurs de « grande démission ». Vous avez là un large éventail de possibilités.

· Pensez à la diversité des âges : selon qu’on ait 25 ou 45 ans, on ne se montre pas intéressé par les mêmes avantages. Les plus jeunes privilégieront un premier achat. Les quadras auront besoin de mesures qui favorisent la famille, et les plus âgés chercheront à renforcer leur système de prévoyance et à obtenir de quoi venir en aide aux parents qui vieillissent.

· La catégorie professionnelle offre la même diversité de situations : les ouvriers n’ont pas les mêmes attentes que les techniciens, qui eux-mêmes se distinguent de la haute maîtrise et des cadres.

 Les spécificités propres aux différents métiers au sein de l’entreprise ou relevant de ses spécificités peuvent receler des gisements d’améliorations qui contribueraient directement à l’objectif de bien-être au travail.

· N’oublions pas non plus la situation géographique. Bien des grandes entreprises sont multisites, qu’il s’agisse de sociétés de services couvrant le territoire national ou d’industries ayant des sites de production distincts des services administratifs et du siège. Vous ferez un bide en proposant des mesures destinées à faciliter les transports en commun des salariés vivant en milieu rural, et inversement en promettant une voiture de fonction à un Parisien.

Quelques idées sans cotisations supplémentaires

Mon propos a surtout pour objectif de vous inviter à engager une réflexion avec les délégués syndicaux, plus particulièrement les réformistes, sans vous restreindre aux mesures d’augmentations générales car ce qui est vraiment utile aux salariés, c’est de réduire leur reste à charge.

Voici quelques idées qui n’imposent aucune cotisation supplémentaire :

Le trajet domicile-travail : vous pouvez aider vos salariés jusqu’à 800 € par an et par salarié. Avantage pour l’entreprise : plus de 620 € (que vous pouvez utiliser pour de nouvelles mesures) car cette somme est non chargée ;

· Le repas et les titres restaurant : pris en charge jusqu’à 1430 € par an et par salarié, ils font remonter un avantage de 1120 € pour l’entreprise (6,50 € de plafond multiplié par le nombre légal de jours travaillés) ;

· L’équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle : la prise en charge du service à la personne est possible jusqu’à 2265 € par an et par salarié. Avantage pour l’entreprise : 1120 €, la somme étant non chargée. C’est une mesure très attractive pour les salariés car elle permet une prise en charge partielle du service à la personne (aide à domicile, accueil des enfants de moins de 6 ans, garde d’enfants…) ;

. La mise à disposition d’équipement ou aides financières, avec l’amendement Savin, s’applique aux activités sportives ;

· La mise en place de programme d’accompagnement pour l’achat du premier bien immobilier répondra aux besoins des jeunes ;

·  Un support pour sécuriser le budget des salariés dans le financement des études de leurs enfants sera plébiscité par les parents…

Une nouvelle approche conduite avec nuance

Ces mesures sont particulièrement intéressantes. En plus de sortir de la logique des augmentations salariales qui sert les intérêts des plus maximalistes, elles répondent aux nouvelles attentes des salariés : 66 % des salariés français considèrent que l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle est la première priorité (étude JLL). En revanche, ces mesures vous demandent d’avoir bien étudié le profil de vos salariés afin d’avoir une réelle utilité et de ne pas être perçue comme un gadget. Dans certains cas, vous devrez veiller à ne pas bousculer d’un coup toute votre culture d’entreprise en entamant cette négociation annuelle dans une approche radicalement nouvelle, ce qui pourrait apparaître comme une manœuvre déstabilisante. Les mesures, mais le sens de la mesure, somme toute !

>> Sur l’ensemble des points à aborder en négociation, DiaNego Learning vous propose une formation « Négocier efficacement la NAO » vous permettant de décoder les spécificités des OS pour anticiper leurs demandes et adopter les bons comportements. Vous gagnerez ainsi en sérénité et en efficacité dans la conduite des NAO.

>> Lisez aussi le livre Relations sociales en pratique, osez le dialogue (Magali Courmontagne, David Hindley) paru en octobre 2022 chez Dunod.

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